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Chronique vintage | La «French connection», une fierté d’ici qui a marqué l’histoire des Sabres de Buffalo

Au cours des années 70, plusieurs figures québécoises ont marqué l’époque au sein de la LNH. Des noms comme Guy Lafleur, Marcel Dionne, Jean Ratelle ou bien Jacques Lemaire dominaient cette décennie en cumulant plus de points que la majorité des joueurs d’aujourd’hui peuvent totaliser en carrière. Parmi ces légendes du hockey, on retrouvait aussi un jeune homme de Victoriaville, un autre de LaSalle et enfin, un petit dernier de Trois-Rivières: Gilbert Perreault (centre), Rick Martin (ailier gauche) et Rene Robert (ailier droit). Ces trois joueurs ont évolué ensemble de 1972 à 1979 au sein de Sabres de Buffalo, formant ainsi la mythique combinaison surnommée «The French Connection». Ce nom, inspiré en premier lieu de l’origine des trois joueurs québécois, a également été pris du fameux film de 1971 portant le même nom. L’un des meilleurs trios d’attaquant de l’histoire de la LNH a marqué une époque à Buffalo tout en étant la référence par excellence en termes de combinaison parfaite d’aptitudes et de chimie.

Gilbert Perreault (1970 à 1987)

On ne peut remettre en doute la loyauté de Gilbert Perreault envers le club qui en a fait son tout premier choix en 1970, puisque celui-ci a disputé ses 17 saisons dans la LNH dans l’uniforme des Sabres. Le produit issu de la Ontario Hockey Association s’alignait avec les Canadiens juniors de Montréal en 1967, et ce, jusqu’à sa sélection comme premier choix en 1970. Terminant derrière Réjean Houle au chapitre des points à sa deuxième saison, Perreault se démarque déjà en bas âge. Houle quitte la saison d’après pour la LNH et Perreault prend les reines de l’équipe. Sa production passe de 49 à 121 points en trois saisons.

En 1970, deux équipes d’expansion voyaient le jour dans la LNH: les Canucks de Vancouver et les Sabres de Buffalo. Un tirage sous forme de roulette avait lieu pour déterminer qui aurait le premier choix. Buffalo remporte donc le tirage et jette son dévolu sur Perreault. C’était d’ailleurs la première année que le Canadien de Montréal n’avait pu l’exclusivité des Québécois lors de l’encan annuel. Dès sa première saison, le natif de Victoriaville s’illustre en remportant le trophée Calder et en affichant un total de 72 points en 78 parties. Sa production demeure sensiblement la même l’année suivante, voyant par contre son total d’assistances être augmenté au détriment de son nombre de buts. Perreault était réputé pour ses incroyables mains et son maniement de rondelle hors du commun, ce qui en faisait un excellent fabricant de jeu.

Perreault gagnait du respect dès ses premières campagnes dans la LNH. Phil Esposito disait même que si un joueur avait à battre son record de 76 buts et 151 points en une saison, ce serait Perreault. Malheureusement, cette prédiction audacieuse ne se sera jamais concrétisée. À ses deux premières saisons, il est choisi pur le Match des étoiles. Au cours des années 70, tous joueurs confondus lors de cette décennie, Perreault se classe au cinquième rang des pointeurs avec 869 points en 753 parties. Ce n’est qu’à partir de cette fameuse campagne de 1971-1972 que Perreault commence réellement à graver son nom dans l’histoire de la LNH. En effet, avant le début de cette saison, les Sabres avaient sélectionné Rick Martin comme premier choix à l’encan annuel. Martin, un ancien coéquipier de Perreault au sein des Canadiens juniors, était la deuxième pièce de ce mythique puzzle.

Rick Martin (1971-1982)

Cinquième choix total du repêchage de 1971, Rick Martin est issu de la même équipe que Perreault. Son développement se fait plus lentement à ses deux premières années avant d’exploser à sa dernière saison junior avec 122 points, dont 71 buts. Martin s’illustre à sa première saison avec les Sabres, inscrivant 74 points en 73 parties. Le natif de LaSalle a maintenu des standards assez élevés de façon constante tout au long de sa carrière, sans toutefois remporter d’honneurs individuels. Martin était considéré comme un buteur naturel et il se situe d’ailleurs au 11e rang dans l’histoire de la LNH au niveau de la moyenne de buts par rencontre (0,56). Il possède également le record d’équipe pour le nombre de tours du chapeau en carrière, le nombre de parties de quatre buts, le nombre de saisons à 40 buts, le nombre de saisons de 50 buts ainsi que le nombre de saisons consécutives avec ce même total de buts.

Rick Martin a marqué l’histoire de la LNH pour sa présence au sein de la «French connection», mais aussi parce qu’il a été impliqué dans l’une des plus terrifiantes scènes dans le hockey. En 1977, Dave Farrish, des Rangers de New York, l’a fait culbuter avec une telle violence que Martin s’est cogné la tête sur la patinoire à un point tel où il convulsait, inconscient. Après ce terrible accident, les joueurs des Sabres arboraient presque tous des casques protecteurs. De plus, en 1980, la carrière de Martin prend une tournure dramatique alors qu’il se dirigeait en échapper contre les Capitals. Un joueur adverse l’a fait trébucher et Martin a terminé sa chute dans Mike Palmateer, gardien de Washington à l’époque. Celui-ci, sorti de son filet, a accidentellement botté le nez de Martin, lui causant de sévères blessures au cartilage facial. Cette blessure met fin à sa brillante carrière de façon quelque peu prématurée, malgré une tentative de retour au jeu infructueuse l’année suivante avec les Kings de Los Angeles. Martin est décédé en 2011 et a été honoré par les Sabres, qui ont peinturé son numéro (7) derrière chacun des buts du défunt HSBC Arena lors de la saison 2011-2012. La partie la plus brillante de sa carrière demeure entre 1972 et 1979 et ce n’est qu’en y ajoutant la toute dernière pièce que la «French connection» prend naissance.

Rene Robert (1970-1982)

Ce joueur natif de Trois-Rivières connaît un parcours bien différent de ses deux comparses de la «French connection». En effet, après ses années Junior A à Trois-Rivières, il s’aligne consécutivement dans la CHL, la AHL et la WHL avant d’obtenir sa réelle première chance dans la LNH au sein des Maple Leafs en 1970. Il est relégué aux mineurs assez vite et ce n’est que la saison suivante, chez les Penguins de Pittsburgh, qu’il est en mesure de jouer 49 parties dans la grande ligue. Ce joueur non repêché s’est fait échanger vers la fin de cette même saison en retour d’Eddie Shack. Les Sabres mettaient donc la main sur son troisième as qui forma officiellement la «French connection.» La carrière de Robert prend donc un élan foudroyant, récoltant 83 points à sa première saison complète à Buffalo. Robert demeure un membre des Sabres jusqu’en 1979 avant de se retrouver chez les Rockies du Colorado [N.D.R.: non ce n’est pas au baseball]. Cet attaquant au petit gabarit s’est illustré par sa capacité à jouer dans les deux sens de la patinoire. Joueur complet à part entière, il pouvait faire sa place sur la première vague de l’avantage numérique tout en obtenant du temps de jeu sur le désavantage. Les trois Québécois ensemble réunis en 1972 formeront un trio électrisant, allumant foules et partisans et terrorisant les trios adverses.

La «French connection»

Rares sont les trios qui fonctionnent de façon régulière pendant de longues années. Dans le hockey d’aujourd’hui, si un trio n’est pas déformé après 10 parties, on parle presque d’un exploit. Trouvé trois joueurs pouvant se compléter parfaitement n’est pas une tâche facile également, mais les Sabres ont pu en bénéficier pendant pas moins de sept ans. Ensemble, le trio québécois a guidé les Sabres jusqu’en séries éliminatoires à chaque saison, excepté en 1974 puisque Perreault a manqué de nombreuses parties des suites d’une fracture à la jambe. L’année suivante, la «French connection» se rendait jusqu’en finale de la Coupe Stanley, sans pouvoir soulever le précieux trophée. Les trois joueurs réunis, c’est 18 présences au Match des Étoiles et plus de 1600 points ensemble lors des sept années sur le même trio. Une combinaison parfaite formée d’un joueur ayant les mains et la vision d’un fabricant de jeu (Perreault), un buteur naturel (Martin) et un attaquant complet (Robert). Encore aujourd’hui, la majorité des records d’équipe sont maintenus par l’un de ces prolifiques joueurs et leur renommée n’a pas disparu avec le temps à Buffalo. L’ultime couronnement d’une carrière émérite a eu lieu en 1989, l’année où la «French connection» est officiellement intronisée au Temple de la Renommée des Sabres de Buffalo. Seul Gilbert Perreault a vu son nom immortalisé au Temple de la Renommée du hockey en 1990, la même année que les Sabres ont décidé de retirer son gilet. Ses deux acolytes sont venus le rejoindre cinq ans plus tard, alors que les trois numéros (11 pour Perreault, 7 pour Martin et 14 pour Robert) reposent désormais dans les hauteurs du KeyBank Center, sous une bannière à l’effigie de la «French connection». Une statue à leur image est également placée devant l’amphithéâtre de Buffalo.

Dans le hockey moderne, jamais une combinaison parfaite et dominante comme la «French connection» n’a pris forme. Toutefois, plusieurs analystes, journalistes et commentateurs se sont amusés à faire des comparatifs par le passé. En 2005, à Buffalo également, l’arrivée de Jason Pominville au sein des Sabres a déterré de grands souvenirs chez les partisans des Sabres, alors que l’équipe avait déjà Jean-Pierre Dumont et Daniel Brière dans l’alignement. Comme de fait, lors de la première rencontre de Pominville dans le grand club, les trois Québécois sont placés sur le même trio. L’histoire ne peut toutefois point se répéter, car malgré l’excitation vive des journalistes, cette fausse «French connection» est très loin des succès de l’originale, malgré les bonnes récoltes de chaque joueur en individuel. Avec le Canadien de Montréal de cette époque, il n’était pas rare de voir plusieurs Québécois s’aligner sur le même trio. Toutefois, garder la même unité pendant sept ans n’aura pas été une réalité à Montréal et qui plus est, un trio francophone dans une ville francophone était tout ce qui avait de plus normal pour le partisan. Ce qui rend la chose encore plus mythique pour la «French connection», c’est qu’un trio francophone s’est illustré en terrain américain, dans un vestiaire où l’anglais régnait et dans une époque où la grande majorité des Québécois s’alignaient chez le Canadien. Reverra-t-on un jour une telle combinaison aussi parfaite ? Probablement pas, car le hockey d’aujourd’hui est une question de gros sous et de roulement de personnel.

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