À la loupe | La progression statistique de Caufield est-elle si impressionnante pour un choix de 1er tour issu de la NCAA?
Dans les derniers jours et surtout depuis que Marc Bergevin a annoncé que l’espoir du CH tournera pro à la fin de sa saison, je vois passer beaucoup de commentaires à l’effet que Cole Caufield affiche des statistiques ahurissantes présentement dans la NCAA. Lorsque je regarde son rendement, c’est clair qu’il s’installe parmi les meilleurs au pays dans les rangs universitaires à son âge.
Cela dit, »ahurissant » est peut-être un mot fort pour le rendement actuel de Caufield. Lorsqu’on regarde les marqueurs présentement dans la NCAA, Caufield se trouve au 2e rang derrière David Farrance (21 ans), qui compte 14 points en six rencontres. Chez les joueurs du même âge, Dylan Holloway présente une meilleure moyenne de point par match que Caufield. Shane Pinto et Matthew Boldy connaissent aussi de bonnes saisons, mais leur rendement moyen de point par rencontre est plus faible que celui de Caufield.
Procédé d’analyse et échantillonnage
C’est devant ce débat que j’ai décidé de me pencher sur le rendement de tous les choix de premier tour évoluant en NCAA entre 2015 et 2019. Où se situe Caufield parmi tous ces joueurs ? Dans mon analyse, je me suis penché sur les productions au cours des premières saisons des joueurs ainsi qu’au cours des secondes saisons. J’aurais également pu y ajouter Adam Fox, qui a affiché d’excellentes statistiques en NCAA, mais comme c’est un choix de 3e tour, je ne l’ai pas ajouté à mes tableaux. À noter que certains joueurs ont débuté leur carrière en NCAA avant d’être repêchés comme indiqué dans mes tableaux.
J’ai choisi de ne pas y insérer les choix 2020 parce que la saison actuelle repose sur une variation du nombre de matchs joués, ce qui peut fausser l’analyse. C’est d’ailleurs pour cette raison que le tableau évaluant la 2e année des joueurs est classé en fonction de la moyenne de points par match.
Voici donc le rendement des choix de premier tour à leur première saison en NCAA:
Constats
Dans ce tableau, on remarque que Caufield arrive au 8e rang des sélections de 1er tour pour le rendement de recrue en NCAA. À noter que Tyson Jost et Trent Frederic ont connu de meilleures moyennes de points par match que Caufield lors de cette période au même âge. Ce qui est impressionnant, c’est de voir la domination d’Eichel à sa saison recrue, à 17 ans, avant même d’avoir été repêché.
Luke Kunin, Tage Thompson, Quinn Hughes, Zach Werenski, Charlie McAvoy, Ryan Poehling et Noah Hanifin furent les seuls autres joueurs à commencer leur carrière en NCAA avant même d’avoir été repêchés en NHL. Dans les cas de Kunin, Thompson, Tkachuk et McAvoy, ces joueurs étaient des »late » (né entre le 16 septembre et le 31 décembre), donc ils ont joué la majorité de leur saison à l’âge de 18 ans tout comme Caufield.
Les chiffres de Kyle Connor sont, à mes yeux, les plus impressionnants. Par contre, pour bâtir une comparaison avec Caufield, il faut utiliser la 2e année NCAA de ce dernier pour la comparer à la 1ere de Connor puisque le joueur des Jets a débuté sa carrière, étant »late » également, à 18-19 ans.
Le cas de Matthew Boldy est une bonne base de comparaison aussi pour bien situer Caufield. L’attaquant repêché par le Wild a connu une première saison de 26 points en 34 matchs, mais on verra que sa progression entre sa saison recrue et sa 2e campagne en NCAA s’apparente bien à la progression statistique de l’espoir du CH.
Au final, ce qui ressort beaucoup de ce tableau, c’est qu’un bon nombre des joueurs présentés ici se sont retrouvés au niveau suivant immédiatement après. Tout un contexte doit être apposé autour de ce constat, puisque les réalités des organisations sont bien différentes. À Montréal, on a décidé de le laisser en NCAA, ce que l’Avalanche aurait peut-être pu se permettre de faire avec Jost, qui affichait des chiffres similaires à Caufield.
Passons à la 2e saison, c’est là que ça devient intéressant !
Constat
Comme je le mentionnais ci-haut, un bon nombre de joueurs ont quitté après leur première campagne en NCAA. Outre O’Brien (BCHL), Cholowski (WHL) et Bellows (WHL), tous les joueurs sous la barre noire ont signé des contrats professionnels pour y jouer.
Ainsi, Cole Caufield s’installe au sommet des marqueurs chez les choix de premier tour à leur deuxième année. On voit également que Matthew Boldy le suit de près. Comme la COVID fait en sorte que les joueurs n’auront pas le même nombre de rencontres jouées en saison régulière, j’ai décidé d’effectuer une projection de leur rendement respectif sur leur total de matchs l’an dernier. Caufield se dirige vers une saison de 54 points (+18 vs saison recrue) sur une projection de 36 matchs, son total de l’an dernier. Boldy, sur une projection de 34 matchs (total l’an dernier), s’enligne pour un rendement de 43 points (+17 vs saison recrue). Donc, la progression statistique de Boldy et de Caufield est très similaire de la 1ere à la 2e année.
Comme il reste 6 matchs au calendrier de Caufield, il doit maintenir un rendement moyen supérieur à deux points par match s’il veut atteindre le plateau des 50 points à 19 ans. Donc dans un contexte de projection sur une saison comme l’an dernier, Caufield aurait 54 points alors que dans un contexte réaliste où il ne jouera que 28 matchs, ce sera difficile d’atteindre les 50 points.
Lorsqu’on regarde le rendement de Kyle Connor à 19 ans, alors qu’il n’était qu’une recrue dans cette ligue, on constate que Caufield est loin d’un tel rendement. Statistique ahurissante pour Caufield cette saison ? Non. Statistique ahurissante au même âge pour Connor ? Absolument.
Là où c’est intéressant cela dit, c’est d’observer le rendement de Caufield, à 19 ans, versus un joueur comme Makar. Je sais, c’est un défenseur, mais Caufield connaît de bien meilleures productions offensives que cette vedette de la NHL âge pour âge.
Makar, comme recrue de 18-19 ans en NCAA, a connu une saison de 21 points. À 19 ans, Caufield s’enligne pour une saison de 45-50 points. Le défenseur maintenant chez l’Avalanche, à 19-20 ans, voit sa production moyenne par match (1,2) derrière celle de 19 ans à Caufield (1,5). Avec un an de moins, Caufield produit plus que Makar.
Du côté de Quinn Hughes, on a connu une campagne de 18 ans, sa 2e en NCAA, de 1,03 point par match, ce qui s’approche de la production de 18 ans à Caufield.
Quelques autres constats rapides:
– À 18 ans, Caufield a connu une production similaire à Farabee, qui est une pièce importante des Flyers présentement. Caufield ne possède toutefois pas le même style de Farabee, donc c’est difficile de le projeter de la même façon en NHL.
– Ryan Poehling, à 18 ans mais à sa 2e année NCAA, a connu une meilleure production âge pour âge que ces attaquants à leur saison recrue: Brady Tkachuk (même production), Jack Roslovic, Josh Norris, Oliver Wahlstrom
– Caufield, à 18 ans, est très loin de Boeser, mais l’a ensuite dépassé dans sa production de 2e année.
– Caufield, recrue de 18 ans, a connu la même production offensive que la saison de 18 ans de Werenski (2e année)
– Clayton Keller, à 18 ans, risque d’afficher une production similaire à ce que Caufield aura cette année, à 19 ans et à sa 2e année en NCAA.
En conclusion
C’est difficile d’écarter le contexte dans toute cette analyse statistique. Les systèmes de jeu, les joueurs qui entourent les éléments pointés dans mon analyse… Est-ce que Caufield connaîtra une meilleure carrière que tous les joueurs qui ne se sont pas rendus à la 2e année NCAA parce qu’ils ont tourné pro ? C’est presque impossible à prédire. Tout est dans la façon dont ces joueurs transposent leurs performances dans la grande ligue.
Un joueur comme Brady Tkachuk, qui a produit lors de sa première année à 17-18 ans un total de 31 points, affiche un moins bon rendement pour le même âge que des joueurs comme Farabee et Jost. Par contre, le joueur des Sens apporte beaucoup plus que de l’offensive, ce qui le place en avant-plan au sein de son équipe et son style est tellement fait pour jouer dans le pro que c’est une chose qui ne se pèse pas par la simple observation de statistiques.
Pour ce qui concerne Caufield, je ne suis pas capable de dire que sa production actuelle est hors norme. Il progresse très bien, il produit d’une belle manière, mais lorsqu’on regarde et compare ses statistiques, il produit mieux que certaines vedettes de la NHL au même stade de son développement, mais il se fait égaler par un Clayton Keller de 18 ans, recrue en NCAA, alors que Caufield en est à sa 2e année à 19 ans. Tout en demeurant très loin d’un Kyle Connor à 19 ans et en connaissant une progression similaire à Matthew Boldy…
Avez-vous réalisé d’autres constats que les miens ? N’hésitez pas à les partager !
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