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Événements marquants | Aujourd’hui, John Kordic aurait 55 ans

En cette période où l’actualité est chamboulée par la vague du COVID-19, le monde du hockey est relégué au second plan (et avec raison!). Ceci dit, nous nous donnons toujours la mission de fournir du contenu de qualité pour vous, chers lecteurs. À partir du 21 mars, nous décrirons des moments marquants qui sont survenus dans le courant de l’histoire de la LNH pour chacune des journées qui passent. Après tout, lorsque nous appliquons la distanciation sociale et que nous sommes en télétravail, du temps, on en a ! Commençons ces nouvelles chroniques en abordant un événement survenu le 22 mars 1965. En fait, cette journée-là, le robuste attaquant John Kordic voyait le jour dans la ville d’Edmonton. Dans ce billet, nous allons revoir ensemble sa carrière, sa descente aux enfers jusqu’à l’événement tragique du 8 août 1992, qui sera décortiqué sous tous ses angles.

Un dur de dur offensivement respectable

John Nick Kordic est né à Edmonton, mais sa famille provient de l’Europe de l’Est. Dans un documentaire présenté sur le réseau RDS, on y expliquait que Kordic a reçu une éducation très restrictive, axée sur la discipline et ce n’est pas une surprise d’apprendre que son père détestait le fait que son enfant devait se battre pour aspirer à la ligue nationale. Ce rôle, il l’obtient une fois dans le junior chez les Winter Hawks de Portland. Défenseur au bon gabarit, il présentait un talent offensif étonnant tout de même. À sa deuxième année seulement dans la WHL, Kordic frôle le point par match en moyenne. Par contre, les recruteurs et les entraîneurs sont clairs à son égard; s’il veut aspirer à la ligue nationale, il doit se battre.

Il devient ainsi une superstar. Les gens le reconnaissent dans la rue, mais cette gloire est accompagnée d’une angoisse profonde puisque Kordic ne se plaisait pas vraiment à l’idée de devoir se battre toujours. C’est tout de même cet aspect de son jeu qui lui a permis d’être repêché au quatrième tour par le Canadien de Montréal. Il connaît un succès immédiat en AHL, puis est rappelé par le grand club à sa première année pour joindre le CH en séries. À ce moment, la vie de joueur de hockey de divertissement, à proprement dit, le job de  »goon », s’empare de Kordic à un point maladif. Il connaît son rôle et s’empreignait de ce dernier.

Jean Perron:  »ton rôle est important »

Dans le documentaire sur la vie de Kordic, Jean Perron, entraîneur du Canadien à l’époque, ne s’en cache pas: il voulait que Kordic garde ce rôle de bagarreur. Il explique qu’après plusieurs rencontres, John Kordic raccrochait le téléphone et se mettait à pleurer. La discussion qu’il venait d’avoir avec son père l’avait cassé. Son paternel ne voulait pas qu’il se batte et Kordic a même avoué devant certains journalistes qu’il pouvait apporter autre chose que la bagarre. Perron est intervenu en expliquant clairement que  »ce n’est pas le nombre de minutes jouées qui est important, mais c’est son rôle de bagarreur qui est important pour l’équipe. »

Sa consommation de cocaïne avait déjà commencé sévèrement. Chris Nilan avait déjà expliqué qu’il soupçonnait les agissements de Kordic en lien avec les stupéfiants. Cela aura pris un Shayne Corson, jeune espoir de l’équipe, qui gèle Kordic en présaison pour que ce dernier commence à sombrer. À la fin du camp, la consommation de stéroïdes anabolisants était fortement soupçonnée puisque Kordic était tout simplement rendu énorme. Son attitude avait également grandement changé; il voulait garder son poste à tout prix. Sa consommation de  »coke » et de stéroïdes fut confirmée par des tenanciers de bar, mais aussi plus tard dans son histoire.

La déchéance

Le Canadien finit par se départir de Kordic. À Toronto, son rôle demeure le même, mais on voit qu’il fournit un peu plus d’offensive. Par contre, l’organisation ne savait pas ce qu’elle venait d’accueillir comme joueur. Plusieurs témoignages font effet que le Canadien, souhaitant polir son image de marque, n’a pas mentionné tous les problèmes qui venaient avec Kordic. Sa consommation de stupéfiants et ses problèmes de santé mentale ne furent pas divulguées et le CH n’a pas essayé d’aider le joueur, si ce n’est que de le sortir de Montréal. Pendant deux jours à Toronto, tout le monde cherchait John Kordic en pleines séries. L’attaquant avait beaucoup de problèmes. Son état de dépendance mettait sa vie en danger. Il développait des troubles paranoïaques et plusieurs amis mentionnaient à l’époque qu’il  »en faisait pitié. »

En 1990-1991, il prend le chemin de Washington après trois matchs chez les Leafs. Cette saison-là, il ne joue que dix matchs et entre en cure de désintoxication. Là-bas, il rencontre l’espoir de qualité Brian Fogarty. Pour connaître l’histoire de ce dernier,consultez notre article en lien ici. Kordic et Fogarty se lient d’amitié et c’est ce qui pousse les Nordiques à acquérir le gros gaillard. On croit que Kordic agira comme mentor auprès de Fogarty, qui connaissait les mêmes problèmes à cette époque que Kordic.

Encore une fois, il se présente au camp dans une forme extraordinaire. Il souhaitait s’aider, mais il échoue rapidement. Les Nordiques ont bien tenté de l’encadrer, lui trouvant un parrain même. Mais Kordic ne s’aide pas. Seul Fogarty demeurait à ses côtés et les deux s’alimentaient dans leurs problèmes respectifs. Ce n’était plus une question de hockey, comme l’expliquait Pierre Pagé, DG des Nordiques à l’époque. Le hockey n’était plus perçu comme une solution. Toutefois, à Québec pendant quatre mois, c’était possiblement les meilleurs moments dans un contexte où Kordic avait des problèmes. Il rencontre sa femme et l’organisation trouve finalement le moyen de séparer Fogarty et Kordic de leur appartement (ils étaient colocs).

Une intervention policière qui tourne au drame

Le moment où le tout a basculé fut tout juste avant la tenue d’un match à Montréal. Le physio des Nordiques devait amener Kordic pour un test aléatoire de drogue et une fois dans la chambre de Kordic à l’hôtel, le joueur a changé d’attitude. Visiblement, il avait consommé la veille. L’équipe s’était montrée stricte: s’il consommait, il quittait le club. Il passe le test quand même et ce fut positif. Le club le libère de son contrat. C’est la fin de Kordic dans la LNH. Comme l’explique sa femme dans le documentaire sur sa vie, Kordic se réfugie au Motel Maxim sur le boulevard Wilfrid-Hamel à Québec après cette nouvelle qui l’aura détruit. Sa conjointe et un ami s’y présentent et y trouvent un homme intoxiqué fortement à la drogue. Il leur explique que son aventure avec les Nordiques était terminée.

Sa femme expliquait que l’homme fort avait un réel mal de vivre. Personne n’a pu le sauver et sa manière de se réfugier dans la drogue, qui l’a conduit vers des problèmes de santé mentale sévères, l’aura amené vers la fin de sa vie. Le 8 août 1992, il appelle également de nombreux amis et les invite à venir le rejoindre à sa chambre de motel. Personne ne s’y est présenté. Les seuls à s’être présentés devant la porte du Motel, ce sont les policiers de Québec.

Avec un appel de désordre reçu au dit Motel, les policiers de L’Ancienne-Lorette demande assistance aux policiers de la Ville de Québec (avant les fusions) pour venir intervenir sur un homme intoxiqué. Dans la chambre 205, Kordic est en crise totale. Il brise tout et démontre des signes de délirium agité. Le plan initial voulait que les policiers l’amènent à l’hôpital pour y recevoir les soins et vu son état, les agents de la paix avaient le pouvoir de l’amener de force puisqu’il représente un danger imminent pour lui et les autres. Sur place, des seringues non-utilisées et des éléments prouvant la consommation de cocaïne furent trouvés.

Décès et débat

Des négociations pour calmer l’homme fort se déroulaient alors que plusieurs policiers attendaient à l’extérieur de la chambre. Kordic était en sueur, criait, marchait de long en large et ça, ce sont tous des signes de délirium agité. Lorsqu’un individu est dans un tel état, souvent causé par la surconsommation, on parle d’une force humaine accentuée, une résistance à la douleur accrue et une distorsion de la réalité. Lorsque le policier à l’intérieur de la chambre avise Kordic qu’il est en état d’arrestation pour méfait et désordre, les fils se touchent.

Kordic refuse d’obtempérer de façon si convaincante qu’il décide de sortir de la pièce. Il se met à courir vers les policiers et repousse les policiers dans le cadre de porte. Kordic soulève les policiers dans les airs, envoie des policiers dans les murs et résiste activement à son arrestation. Avec une technique d’immobilisation, Kordic est maîtrisé au sol avec 6 ou 7 policiers de ce qu’on m’a raconté. Tout le long de l’intervention, les policiers maintiennent un contact verbal, mais l’individu est littéralement hors de lui. Il force sans arrêt et crie très fort. Les ambulanciers arrivent sur place et les signes vitaux semblent bons selon le personnel. On annonce son décès quelque temps après.

Par la suite, plusieurs débats ont alimenté les tribunes.  »La police a tué John Kordic », pouvait-on entendre de la bouche d’un tenancier de bar et ami de Kordic. La réalité policière de l’époque voulait qu’aucun patrouilleur ne possédait de  »taser ». Les forces de l’ordre ont dû user de la seule chose possible dans le moment: leur force physique. Avec la surconsommation de la soirée et la façon dont il s’est débattu, son coeur a lâché en pleine intervention policière. Dans un cas comme tel, pour éviter l’asphyxie positionnelle d’un individu en crise, les policiers se doivent d’agir rapidement et c’est ce qui a été fait selon les explications de Dominic Gaudreau et de François Collin, deux policiers rencontrés dans le documentaire présenté par RDS. Lorsque l’homme est maîtrisé au sol, il faut trouver une façon de le relever, de ne pas le garder sur le ventre avec un poids humain multiplié sur lui. Par contre, c’est toujours facile à dire de l’extérieur, mais la réalité est grandement différente, surtout dans les cas de délirium agité.

Les formations, les pratiques et les méthodes policières ont pris un tournant historique après cet événement tragique. Ses proches, toutefois, restent avec beaucoup de questions. Bien que le laboratoire scientifique en médecine légale ait sorti publiquement le fait que des stéroïdes anabolisants (dont certains issus de médecine vétérinaire) et une quantité impressionnante de cocaïne furent trouvés dans son sang et son urine, la famille croit toujours que les policiers seraient en tort. La légiste, dans le documentaire, mentionne que la quantité de  »coke » était si élevée que l’urine de Kordic se cristallisait lors de l’analyse. La santé mentale, la consommation de drogues telles que la cocaïne et les stéroïdes en plus des commotions subies au cours de sa carrière furent un mélange très explosif pour un Kordic qui venait de tout perdre.

John Kordic, aujourd’hui, aurait 55 ans.

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