Gabe Landeskog parle des commotions : « C\’était comme si deux blocs de ciment écrasaient chaque côté de mon crâne »
Créée en 2014 par l\’entremise de Derek Jeter, ancienne vedette de l\’équipe MLB des Yankees de New York, \ »The Players\’ Tribune\ » est une plateforme médiatique permettant à des joueurs, de ligues et de disciplines différentes, de prendre la parole via des textes souvent écrits à la première personne. Devenu un moyen de communication prisé par de nombreux athlètes professionnels, le site internet accueille également des contributeurs venus du monde du hockey. Hier, c\’est l\’attaquant de l\’Avalanche du Colorado Gabriel Landeskog qui a prit la parole, pour faire part de son implication au sein d\’une polémique qui enfle dans le petit monde de la LNH : les conséquences des commotions cérébrales.
Dans l\’optique d\’expliquer en quoi cette problématique le touche personnellement, l\’ailier suédois nous raconte comment, en 2013, une rencontre de saison régulière à San José a tourné au désastre, suite à une charge rude qui lui fut assénée par Brad Stuart, alors défenseur chez les Sharks :
\ »Tout a viré au noir. Je n\’entendais que la foule qui rugissait, avant de me remettre debout, doucement. J\’avais perdu mon bâton dans la collision, et je n\’arrivais pas à le retrouver, alors j\’ai patiné vers le banc aussi vite que j\’ai pu. Je ne voulais pas en donner encore plus aux spectateurs.\ »
Après l\’incident, visible ici, il s\’en suivra une bagarre entre Stuart et Ryan O\’Byrne, partenaire de Landeskog dans les Rocheuses. Si il semble à première vue que le capitaine du Colorado s\’est vite rétabli du choc, les apparences furent vite trompeuses. Touché au genou, saignant du nez, le natif de Stockholm cherche néanmoins à se reprendre, et a assumer ses responsabilités envers le reste de l\’effectif :
\ »Je me disais, il viennent de te donner le \’C\’ alors retourne au jeu pour tes coéquipiers !\ »
Grandement honoré par une telle distinction, faisant de lui au passage l\’un des capitaines d\’équipe les plus jeunes de l\’histoire de la ligue nationale, notre homme cherchera tout d\’abord a cacher les conséquences traumatiques du choc, qu\’il ressenti le lendemain de la rencontre, alors que lui et sa formation avaient rallié l\’Alberta pour y défier les Oilers :
\ »Nous nous sommes envolés pour Edmonton après le match, et lorsque je me suis réveillé à l\’hôtel le lendemain matin, ma tête palpitait. C\’était comme si deux blocs de ciment écrasaient chaque côté de mon crâne. Je me souviens que mon réveil ne s\’arrêtait pas, et que ce son me tuait. Lorsque j\’ai pris mon cellulaire pour appeler l\’entraîneur, la luminosité de l\’écran était tellement atroce que j\’ai dû m\’en détourner. Mais aussi fou que cela puisse paraître, lorsque le coach m\’a demandé comment j\’allais, mon instinct a prit le dessus et j\’ai dit que je me sentais bien.\ »
Si cette expérience ne fut guère agréable, Landeskog tente cependant de voir plus loin que son propre cas. Comme il l\’explique, il n\’a pas senti une trop grande pression concernant son retour au jeu à l\’intérieur de l\’organisation. Ainsi, ses partenaires ne l\’ont pas poussé à écourter sa convalescence, quand bien même son absence a pu affecter l\’équilibre du groupe, et son cas fut rapidement pris en charge par une équipe médicale compétente dès son retour à Denver. Cette compréhension qui a entouré les suites de sa blessure symbolise, selon Landeskog lui-même, les débuts d\’un changement de culture dans les vestiaires LNH. Afin de faire comprendre la difficile position du joueur touché par une commotion cérébrale, la blessure invisible par excellence, l\’ailier suédois tient donc à mettre en lumière la complexité des syndromes qui suivent un lourd choc à la tête.
Après une semaine de convalescence, Landeskog est toujours confiné dans sa maison. Sans possibilité de se rendre aux rencontres pour soutenir ses coéquipiers du fait de son impossibilité à s\’exposer aux bruits de la foule, il est néanmoins autorisé à regarder la télévision par petites tranches d\’une quinzaine de minutes. Son ami Johan est présent à ses côtés, et rapidement, il lui demande d\’éteindre la TV, puis toutes les lumières de la salle. Malgré tout, son invité le convainc d\’allumer une petite cheminée électrique à l\’autre bout de la pièce, afin d\’offrir un minimum d\’éclairage pour que les deux hommes puissent se voir :
\ »Après un moment, je me suis tourné vers lui est je lui ai dit : « Désolé mon pote, mais on va devoir éteindre ça aussi ». Johan a commencé à rigoler, il croyait que je voulais plaisanter. J\’ai dû lui dire : « Non, sérieusement. Cette lumière tremblotante, ça me dérange. Je n\’y arrive vraiment pas ». Il l\’a éteint, et nous nous sommes assis dans l\’obscurité la plus complète.\ »
Avec ce témoignage, l\’attaquant de l\’Avalanche espère ainsi aider à désinhiber les jeunes hockeyeurs vulnérables touchés par des symptômes semblables. Parfois incompris, souvent eux-même dans l\’ignorance de la nature de leur mal, ils sont ceux auxquels il souhaite apporter son soutien :
\ »Imaginez un tout jeune joueur du Manitoba ou de la Floride avec les mêmes symptômes et imaginez à quel point il pourrait se sentir perdu. […] Je veux que les enfants et leurs parents comprennent la complexité du syndrome post-commotion, tout en prenant également en compte que si vous traitez une blessure de ce type avec sérieux et que vous vous donnez le laps de temps nécessaire pour vous en remettre, vous pouvez la surmonter.\ »
Au final, l\’ami Gabriel tient à ce que ce message de prévention soit entendu et relayé. Ainsi, il travaille actuellement aux côtés de la Fondation EMPWR (ici, le lien vers leur site internet) pour permettre l\’évolution du débat autour de la convalescence qui suit les commotions cérébrales, et une meilleure compréhension du sujet pour le grand public. Ces questions sont d\’une grande importance pour l\’attaquant suédois, qui en guise de conclusion à sa tribune rappelle aux plus jeunes joueurs en quoi une réaction rapide à ce type de mal est primordiale :
\ »Vous n\’avez qu\’un seul cerveau. Si vous n\’en prenez pas soin, vous pouvez en souffrir les conséquences pendant très longtemps. Si vous vous sentez confus, ou que vous vous asseyez seul dans une pièce obscure, en vous demandant ce qui ne va pas chez vous, allez voir un docteur immédiatement. Prenez autant de temps qu\’il le faut pour vous remettre. Et si quelqu\’un vous en parle comme d\’un signe de faiblesse, vous pouvez lui dire que Gabe Landeskog est faible, lui aussi.\ »
Une parole qui fait réfléchir, dans le lourd contexte qui englobe actuellement l\’attitude de la ligue envers le dossier des commotions cérébrales et de l\’ETC.
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