Tricherie, corruption… Un journaliste russe largue une bombe concernant le «SKA de Putin»
En fait, on pourrait presque dire «des bombes», car Slava Malamud s’est littéralement levé pour dénoncer toute la situation autour du SKA de St.Petersburg. Tout d’abord, qui est cet homme et surtout, lâche-t-il tout cela dans un élan de frustration sur un compte Twitter de bas niveau ? Absolument pas. Malamud est un journaliste russe suivi par plus de 17 000 personnes sur Twitter et il collabore fréquemment avec le Journal de Montréal, offrant des articles intéressants sur la KHL. Le journaliste a longtemps dénoncé les inégalités et le favoritisme présents au sein de la KHL, mais aujourd’hui, il passe à un tout autre niveau.
Le SKA de Putin
En KHL, c’est présentement la première ronde des séries éliminatoires. Évidemment, le SKA a obtenu le titre de champions de saison avec une fiche exceptionnelle de 47-9. Ce fut une grosse année d’ailleurs pour plusieurs joueurs de cette formation, alors que l’équipe olympique de Russie était formée presque uniquement d’éléments du SKA. Rapporter l’or était le seul but visé par la Russie lors du tournoi de hockey olympique et Vladimir Putin semble avoir tout mis en place pour y arriver.
1/ So, here is what’s happening in the KHL, for those who still can’t quite grasp the banality of evil, Russian style… The entire league has been set up this year to allow SKA to win. It’s Putin’s team, this is Putin’s election year, it’s chock full of OAR Olympians…
? Slava Malamud (@SlavaMalamud) 8 mars 2018
2/ SKA is allowed to ignore the salary cap, its payroll is 6 times that of an average team, it has dibs on every star who considers the KHL. Most of its players are rabid Putin supporters who took part in his campaign rally last week. I repeat: SKA must win. It’s not an option…
? Slava Malamud (@SlavaMalamud) 8 mars 2018
Comme l’explique Malamud via son compte Twitter, le SKA est l’équipe de Putin. C’est connu. Il les finance, il obtient le soutien des joueurs aux élections, une relation gagnante gagnante quoi. Par contre, lorsqu’on abolit plusieurs règles pour favoriser une formation de la ligue, on parle de corruption. Selon les informations de Malamud, Putin et la KHL ont permis au SKA de ne pas respecter le plafond salarial, alors que leur masse salariale est 6 fois plus élevée que les autres formations. La KHL a même une explication officielle à cela:
«Permettre aux joueurs de se concentrer tous au sein d’une même équipe a permis de créer une chimie incroyable. Faire en sorte que la saison soit plus facile pour eux a permis d’éviter les blessures fâcheuses, mais aussi la baisse de moral avant les JO. C’est pourquoi nous avons remporté l’or.»
Vous croyez que cela s’arrête là ? Vous vous trompez, car Malamud poursuit son «lynchage» public de la KHL en s’attaquant ensuite aux magouilles utilisées pour ouvrir la voie au SKA vers un autre championnat. En faisant en sorte que la saison soit truquée, la KHL démontre tout son impact sur l’aspect politique et sur les valeurs patriotiques envers la Russie. Putin s’en va en élection, la voie vers la médaille d’or était grande ouverte en l’absence des joueurs de la LNH, il fallait tout mettre en place pour aider le «SKA de Putin».
On est en séries éliminatoires, le SKA affronte le Severstal Cherepovets. Équipe pauvre qui a connu une saison aux allures des Chiefs de Charlestown comme le dirait Malamud, en raison de leur situation financière précaire, le Severstal Cherepovets ne possède aucun joueur issu de la LNH. Ils ont été les derniers à se classer en séries avec une fiche de 27-29. Pour le SKA, c’est une formalité de passer en deuxième ronde, ce qu’ils ont fait en défaisant le Severstal Cherepovets en trois matchs. Ceci dit, même avec les JO derrière nous, la KHL use de tricheries pour faire avancer son équipe chérie.
Dans le premier match, Malamud critique vivement le fait que les officiels n’ont pas cessé de punir le Severstal Cherepovets. Vainqueur par la marque de 3-2, le SKA a bénéficié de 24 avantages numériques alors que le Severstal Cherepovets n’en a profité d’aucuns. 24-0 au chapitre des pénalités, du jamais-vu dans ma carrière de hockeyeur et en huit ans d?arbitrage. Apparemment, selon les informations de Malamud, les joueurs du SKA étaient tous présents la veille à un cocktail suivant le discours de Putin comme quoi il se relance pour un autre mandat. Il ne fallait donc pas que le SKA perde…
On saute au deuxième match, où là, le SKA remporte aisément. Le Severstal Cherepovets tient encore tête au SKA pendant la moitié du match, mais cette fois, on n’use pas de tricheries pour permettre au «SKA de Putin» de l’emporter. 2-0 dans la série, on se transporte au troisième match. Et là, encore une fois, on devra utiliser la corruption et la tricherie pour permettre au SKA d’avancer. Jugeons par nous-mêmes:
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? HC Severstal (@severstalclub) 7 mars 2018
Sur le but gagnant du SKA, en prolongation qui plus est, clairement que le défenseur était hors-jeu. Les officiels sont allés à la reprise vidéo, après que l’entraîneur du Severstal Cherepovets ait évoqué son challenge. La reprise, on la voit, c’est évident. Le but est pourtant accordé au SKA, qui avance à la prochaine ronde. Il semblerait, comme l’évoque Malamud, que le Severstal Cherepovets était devenu un réel problème, une nuisance à la réputation du grand «SKA de Putin». On l’a donc écarté du revers de la main. Cela n’aidera en rien la situation de ce club, puisque la KHL avait déjà évoqué de dissoudre l’équipe en raison de ses problèmes financiers. Maintenant qu’ils ont fait mal paraître le SKA, il ne serait pas surprenant de ne plus voir le Severstal Cherepovets dans la KHL l’an prochain.
Des réputations entachées
19/ Probably, the most tragic thing about it is that Pavel Datsyuk, an amazing player and not in any way a politician, is having his name soiled with this by playing for SKA. But that’s what you get when you dance with the devil… Actually, forget it. The most tragic thing…
? Slava Malamud (@SlavaMalamud) 8 mars 2018
Dans toute cette histoire de corruption et de tricherie, ce sont des réputations de grands hommes qui sont entachées. Pavel Datsyuk, comme l’exprime si bien Slava Malamud, n’a jamais fait preuve d?un patriotisme affirmé envers la Russie du temps où il s’alignait chez les Red Wings de Détroit. Loin d’être un «homme politisé» comme le sont Ovechkin et Malkin, la réputation de Datsyuk en prend un coup en s’alignant au sein du «club de Putin». C’est malheureux, mais comme on dit: «y participer, c’est l’accepter.»
Cette situation n’est pas nouvelle. Ce n’est pas la première fois que l’on aborde une telle problématique, alors que mon collègue a offert un papier sur des méthodes de financement d’un certain Gennady Timchemko. Dans le cas présent, la Russie devait assurément prévoir son coup depuis longtemps pour bâtir le SKA en prévision des JO. Comme l’explique Malamud, les partisans, les médias et les joueurs sont tous au courant des magouilles entourant le SKA. Et pourtant, on continue de se fermer les yeux devant une telle destruction du sport qu’est le hockey. Le journaliste russe risque de payer la note pour ses propos, qui ont nécessité 21 tweets afin d’élaborer sa pensée.
Les plaisirs de Putin et le «Motherland’s honnor», comme le dit Malamud, sont ce qui importe le plus chez les Russes. Même banni des JO, ce pays aura tout de même réussi à s’en sortir à l’aide de deux mots: corruption et tricherie. On semble ne pas s’en faire au Kremlin à propos de tous ces athlètes bannis des Jeux, pourvu que Putin aille sa médaille d’or au hockey masculin…
20/21… is that everyone in Russia knows what’s going on. The fans, the officials, the media. It’s out in the open. And the people who have made it happen (all KHL bosses are Putin’s close friends) have already announced that the system has proven effective and should continue.
? Slava Malamud (@SlavaMalamud) 8 mars 2018
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